Julia Varady au Philharmonique


. . . Au Philharmonique cette semaine, à Strasbourg, Jan Latham-Koenig a
dirigé une soirée Wagner et Strauss dont la cantatrice Julia Varady fut la
star très fêtée. La cantatrice hongroise avait renoncé à chanter la Mort
d'Isolde, d'abord annoncée à ce programme. Du coup, le prélude de Tristan,
qui est d'habitude couplé avec la page finale de l'opéra de Wagner, a lui
aussi disparu de l'affiche, pour être remplacé par l'Ouverture des Maîtres
Chanteurs. Pas la page la plus travaillée du répertoire de l'orchestre, en
la circonstance, mais étalée en pâte large et forte, l'accent y étant mis
sur l'expressivité des thèmes cumulés dans la grande polyphonie.
Une longue fête...
Ne voulant pas s'abîmer dans les grandes vagues sonores du Liebestod,
Julia Varady a porté son choix sur un air d'Ariane à Naxos de Richard
Strauss, « Es gibt ein Reich », où l'héroïne abandonnée appelle une mort
libératrice. Et dans la transparence d'un orchestre allégé, la voix de
Varady déploya sa ligne superbement conduite, en tous registres. Et Don
Juan, du même Strauss, vint en contraste enflammé, emporté dans son
mouvement par la baguette de Jan Latham-Koenig. Une version d'une très
belle qualité, soutenue de bout en bout. Après l'entracte, Im Sommerwind,
d'Anton Webern, resta dans la couleur postromantique. Cette pièce de 1904 a
des parentés mahlériennes, voire straussiennes, et la marque personnelle du
compositeur, qui n'était alors pas encore l'élève de Schoenberg, se situe
là dans les recherches d'orchestration et dans la finesse du trait.
Intéressante transition vers les Vier letzte Lieder de Strauss : une Varady
souveraine et lumineuse donna à cet adieu à la vie que sont ces ultimes
pages de Strauss la grande sérénité que cette musique requiert - elle en
imposa à l'orchestre qui, avec son chef, lui fournit un environnement
idéal. Le public fit une longue fête à la cantatrice.

Marc Munch

 

Le Philharmonique donnera ce même programme le 18 mai au Théâtre du
Châtelet à Paris, lors de sa résidence d'une semaine dans la capitale, où
il sera également dans la fosse du Châtelet avec l'Opéra du Rhin, pour des
représentations d'Héloïse et Abelard d'Ahmed Essyad et de Die tote Stadt
d'Erich Korngold.

© Dernières Nouvelles d'Alsace, Dimanche 6 Mai 2001